29 décembre 2011

Noël australien

Mon fils et son amoureuse québécoise, posés depuis quelques mois sur la côte est !


Jamais d'autre que toi


Jamais d'autre que toi en dépit des étoiles et des solitudes
En dépit des mutilations d'arbre à la tombée de la nuit
Jamais d'autre que toi ne poursuivra son chemin qui est le mien
Plus tu t'éloignes et plus ton ombre s'agrandit
Jamais d'autre que toi ne saluera la mer à l'aube quand
Fatigué d'errer moi sorti des forêts ténébreuses et
Des buissons d'orties je marcherai vers l'écume
Jamais d'autre que toi ne posera sa main sur mon front
Et mes yeux
Jamais d'autre que toi et je nie le mensonge et l'infidélité
Ce navire à l'ancre tu peux couper sa corde
Jamais d'autre que toi
L'aigle prisonnier dans une cage ronge lentement les barreaux
De cuivre vert-de-grisés
Quelle évasion !
C'est le dimanche marqué par le chant des rossignols
Dans les bois d'un vert tendre l'ennui des petites
Filles en présence d'une cage où s'agite un serin
Tandis que dans la rue solitaire le soleil lentement
Déplace sa ligne mince sur le trottoir chaud
Nous passerons d'autres lignes
Jamais jamais d'autre que toi
Et moi seul seul comme le lierre fané des jardins
De banlieue seul comme le verre
Et toi jamais d'autre que toi.


Robert Desnos

15 décembre 2011

Ah non !

J'écoutais la radio en buvant mon café ce matin, comme toujours un peu distraite et mal réveillée.
Et comme chaque jour, dans le flux incessant des infos destinées à entretenir le climat propice et nécessaire à endormir nos consciences, un intermède étrange, une brève aussi ahurissante que décoiffante : j'entends que cette année, en cette période où le bon peuple n'aspire qu'à bambocher, les ventes de déguisements de soubrette et de masques de DSK explosent. 
Interview à l'appui du lamentable pourvoyeur de cette pitoyable marchandise, et commentaire amusé du journaliste chargé de l'antenne.
Je sais pas pour vous, mais moi, ça me fait pas du tout marrer.


12 décembre 2011

le prince de la Place Carami #2

Il m’accueille toujours en souriant, sa voix et son accent toujours chantant me surprennent joyeusement lorsque je le retrouve. Il me prend dans ses bras, et je suis chamboulée, chaque fois un peu plus. Dans les moments secrets  et délicieux où nous sommes loin de la fureur du monde, ce sont ses yeux qui me disent son trouble et sur ses traits soudain rajeunis, comme lissés par ces instants magiques où nous ne sommes plus qu’un, je retrouve celui que je suis la seule à connaître, détendu, apaisé, fragile et fort à la fois, si sensuel, si vivant. Nous nous apprivoisons peu à peu et il m’embarque chaque jour un peu plus dans son monde à lui, un monde de musique, de joie de vivre et de partage, une magnifique bulle de touchante humanité. Demain, je fêterai mes 55 ans, et je savourerai notre bonheur tout simple, mes rires se mêlant aux siens et à ceux de mes enfants dont il a su se faire aimer sans rien faire d’autre qu’être lui-même, le doux, sincère et adorable Frankie.

02 décembre 2011

Defifoto pont

Ce mois ci, pas de temps pour mitrailler ! J'ai donc eu recours aux archives, et je me suis aperçue que j'avais quelques ponts en stock!






24 novembre 2011

l'amour la poésie

Il fallait bien qu'un visage
Réponde a tous les noms du monde

Paul Eluard

L'amour la poésie
Premièrement

08 novembre 2011

Allégeance


Dans les rues de la ville il y a mon amour. Peu importe où il va dans le temps divisé. Il n’est plus mon amour, chacun peut lui parler. Il ne se souvient plus; qui au juste l’aima?

Il cherche son pareil dans le voeu des regards. L’espace qu’il parcourt est ma fidélité. Il dessine l’espoir et léger l’éconduit. Il est prépondérant sans qu’il y prenne part.

Je vis au fond de lui comme une épave heureuse. A son insu, ma solitude est son trésor. Dans le grand méridien où s’inscrit son essor, ma liberté le creuse.

Dans les rues de la ville il y a mon amour. Peu importe où il va dans le temps divisé. Il n’est plus mon amour, chacun peut lui parler. Il ne se souvient plus; qui au juste l’aima et l’éclaire de loin pour qu’il ne tombe pas?



06 novembre 2011

le prince de la Place Carami

Une rue, des passants. Une ville comme tant d'autres. En haut de quelques marches, sur une jolie place, sa boutique, la maison de la Presse de la ville en question. Il est là, il se marre, il écoute du blues en faisant son boulot. Depuis quelques jours, je passe souvent le voir. Sa boutique est un joyeux bazar. J’y bouquine un peu, je le regarde vivre et travailler. Il s'est installé depuis pas mal d'années dans cette ville. Il s'y est fait sa place, grande gueule, un peu voyou, impressionnant de bonne humeur, toujours détendu, dansant ou allumant sa clope derrière le comptoir ou Mouss lui a déposé comme toujours les pains de semoule et les pâtisseries de ce matin d’Aïd. Un mot pour chacun, un sourire, une vanne, ça bouge, ça rit, ça pulse. Cet homme là est joyeux, tout le temps. Il parle si vite que parfois je ne parviens pas à comprendre ce qu’il dit. Son accent est celui des quartiers nord de Marseille, aussi vif et puissant que l’énergie qu’il dégage, lui qui ne tient pas en place.  
Il pleut depuis trois jours, la rivière déborde, les routes sont coupées, les maisons inondées. Tous les clients qui entrent en secouant leur parapluie nous racontent un peu la même histoire, les sirènes, les pompiers, la violence de cette incroyable pluie de novembre, qui est tombée encore toute la nuit. Ce matin, en venant chercher leur exemplaire du journal, certains se sont laissés aller à raconter « leur inondation ». C’est si banal, en apparence, le récit d’un choc : les frayeurs, les dégâts, la fatigue de ceux qui n’ont pas dormi, craignant de voir leurs maisons évacuées, leur voiture emportée par les eaux furieuses. 
Ses clients, il les connait tous, leurs prénoms, leurs histoires. Il les écoute. Patient, attentif, moqueur parfois, toujours gentil. C’est un monde à part, la boutique de Franckie. C’est vivant, marrant et bouillonnant, comme lui... C'est tout un monde que je ne connais pas.
De jour en jour, Franck et les siens m’ouvrent leurs cœurs et leurs maisons, les uns après les autres, réveillant cet automne un peu triste d’une chaleur inouïe. J’ai chaud de Zoubida, volubile et rieuse qui me prend dans ses bras et me glisse à l’oreille qu’il faut le rendre heureux. J’ai chaud de voir les gens qui passent me sourire et me saluer d’un air étonné ou complice, quand ils surprennent un regard ou un baiser. 
Je me laisse porter, et plus je le regarde, plus je vois ce qu'il est : un homme drôle et vif, conscient de ses failles et de ses blessures, un électron libre et généreux, qui est devenu pour tous ceux qui le côtoient l'étonnant prince un peu fêlé de la place Carami.

01 novembre 2011


Seule la passion qui trouve son abîme 
Sait embraser ton être jusqu'au fond ; 
Seul qui se perd entier est donné à lui-même.
Alors, prends feu ! Seulement si tu t'enflammes, 
Tu connaîtras le monde au plus profond de toi ! 
Car au lieu seul où agit le secret, commence aussi la vie.

Stefan Sweig




Defifoto lumiere d'automne

Mon modèle pour ce défifoto du 1er novembre, c'est Lili, ma fille, devenue l'espace de quelques heures un très marrant petit diable, acompagnée pour l'occasion par deux délicieuses petites sorcières.
les rejets de la séance de pose...








25 octobre 2011

Translucide


Je te l’ai dit pour les nuages
Je te l’ai dit pour l'arbre de la mer
Pour chaque vague 
pour les oiseaux dans les feuilles
Pour les cailloux du bruit
Pour les mains familières
Pour l’œil qui devient visage ou paysage
Et le sommeil lui rend le ciel de sa couleur
Pour toute la nuit bue
Pour la grille des routes
Pour la fenêtre ouverte pour un front découvert
Je te l’ai dit pour tes pensées pour tes paroles
Toute caresse toute confiance se survivent.
Paul Eluard

21 octobre 2011

de l'amour (encore et toujours)



Cet amour
Si violent
Si fragile
Si tendre
Si désespéré
Cet amour
Beau comme le jour
Et mauvais comme le temps
Quand le temps est mauvais
Cet amour si vrai
Cet amour si beau
Si heureux
Si joyeux
Et si dérisoire
Tremblant de peur comme un enfant dans le noir
Et si sûr de lui
Comme un homme tranquille au millieu de la nuit
Cet amour qu faisait peur aux autres
Qui les faisait parler
Qui les faisait blêmir
Cet amour guetté
Parce que nous le guettions
Traqué blessé piétiné achevé nié oublié
Parce que nous l’avons traqué blessé piétiné achevé nié oublié
Cet amour tout entier
Si vivant encore
Et tout ensoleillé
C’est le tien
C’est le mien
Celui qui a été
Cette chose toujours nouvelle
Et qui n’a pas changé
Aussi vrai qu’une plante
Aussi tremblante qu’un oiseau
Aussi chaude aussi vivant que l’été
Nous pouvons tous les deux
Aller et revenir
Nous pouvons oublier
Et puis nous rendormir
Nous réveiller souffrir vieillir
Nous endormir encore
Rêver à la mort,
Nous éveiller sourire et rire
Et rajeunir
Notre amour reste là
Têtu comme une bourrique
Vivant comme le désir
Cruel comme la mémoire
Bête comme les regrets
Tendre comme le souvenir
Froid comme le marble
Beau comme le jour
Fragile comme un enfant
Il nous regarde en souriant
Et il nous parle sans rien dire
Et moi je l’écoute en tremblant
Et je crie
Je crie pour toi
Je crie pour moi
Je te supplie
Pour toi pour moi et pour tous ceux qui s’aiment
Et qui se sont aimés
Oui je lui crie
Pour toi pour moi et pour tous les autres
Que je ne connais pas
Reste là
Lá où tu es
Lá où tu étais autrefois
Reste là
Ne bouge pas
Ne t’en va pas
Nous qui sommes aimés
Nous t’avons oublié
Toi ne nous oublie pas
Nous n’avions que toi sur la terre
Ne nous laisse pas devenir froids
Beaucoup plus loin toujours
Et n’importe où
Donne-nous signe de vie
Beaucoup plus tard au coin d’un bois
Dans la forêt de la mémoire
Surgis soudain
Tends-nous la main
Et sauve-nous.


Jacques Prévert

20 octobre 2011

de l'Amour


"Constance rentra lentement, comprenant la profondeur de cette autre chose qui était en elle. Un autre moi vivait en elle, fondant, brulant, et doux dans ses entrailles; et, de tout ce moi, elle adorait son amant. Elle l'adorait jusqu'à sentir en marchant faiblir ses genoux. Dans ses entrailles, elle était contente et vivante et vulnérable et sans défense dans son adoration pour lui, comme la femme la plus naïve."

D.H. Lawrence
L’Amant de Lady Chatterley

16 octobre 2011

Largage dominical #28




Operator, number, please: it's been so many years
Will she remember my old voice while I fight the tears?
Hello, hello there, is this Martha? this is old Tom Frost,
And I am calling long distance, don't worry 'bout the cost.
'Cause it's been forty years or more, now Martha please recall,
Meet me out for coffee, where we'll talk about it all.

And those were the days of roses, poetry and prose
And Martha all I had was you and all you had was me.
There was no tomorrows, we'd packed away our sorrows
And we saved them for a rainy day.

And I feel so much older now, and you're much older too,
How's your husband? and how's the kids? you know that I got married too?
Luck that you found someone to make you feel secure,
'Cause we were all so young and foolish, now we are mature.

And those were the days of roses, poetry and prose
And Martha all I had was you and all you had was me.
There was no tomorrows, we'd packed away our sorrows
And we saved them for a rainy day.

And I was always so impulsive, I guess that I still am,
And all that really mattered then was that I was a man.
I guess that our being together was never meant to be.
And Martha, Martha, I love you can't you see?

And those were the days of roses, poetry and prose
And Martha all I had was you and all you had was me.
There was no tomorrows, we'd packed away our sorrows
And we saved them for a rainy day.

And I remember quiet evenings trembling close to you...

15 octobre 2011

Neuf mois

Neuf mois, c'est le temps qu'il m'a fallu pour te rencontrer, t'aimer et te laisser partir. La belle histoire est terminée, mais aussi étrange que cela puisse paraître, c'est vers une renaissance que la fin de l'histoire nous conduit tous les deux. La tienne, parce que tu as souhaité continuer à cheminer sans moi, la mienne, parce que c'est ainsi que je voulais t'aimer: sans jamais te posséder. Les souvenirs sont là, ancrés dans notre chair, enfouis dans nos deux coeurs, lumineux et heureux. Ensemble, nous avons touché du doigt les étoiles. Chacun reprend sa route, la force et la beauté de ces instants précieux que nous avons vécus sont désormais en nous. Ils sont notre secret, le lien qui nous unit. Parce que nous savons que préserver en nous l'éclat de ces quelques mois que nous avons vécus exige désormais d'accepter de passer à autre chose.
On grandit tellement quand on apprend à donner le meilleur de soi même et rien d'autre. 
D'autres amours sans doute nous attendent. Leur saveur sera autre.
Je sais qu'il me sera impossible d'oublier avant longtemps mes doigts effleurant ta peau si douce, l'odeur de mon parfum se mêlant à la tienne, nos rires et nos élans, les petits matins clairs, si clairs quand le soleil aveuglait presque nos yeux troublés et étonnés d'avoir si bien dormi.Sans doute aurai je encore un peu le coeur serré quand l'aube me surprendra, tendant la main sans sentir ton épaule dans mon lit déserté par ton corps si tentant.
Alors que la nuit tombe sur la mer, là bas, dans ta maison, je sais que tu renais, toi aussi.

11 octobre 2011

Que dire ?


Que dire
Des troubles de l'âme
de la glisse des pensées
Des dérapages du sens

Que dire
Du corps qui se rénove
Par la grâce d'une parole
Le secours d'une caresse
La saveur d'une malice

Que dire
Des jours si vivaces
Des heures si ténues
De la geôle des mots
De l'attrait du futur

Que dire
De l'instant
Tantôt ennemi
tantôt ami ? 


Andrée Chédid
"Rythmes"

Comme un écho


Te voilà guéri, intrépide. Intrépide et stupide, secoué dans le désordre que tu détestes, toujours en fuite de quelque chose, ton traîneau entouré de neige et de loups.
Te voilà guéri et seul, revenu l'hiver dans cette grande maison vide où tu écrivais ce livre, entouré d'une famille. Tu écrivais ce livre dont tu corriges les premières épreuves auxquelles tu ne comprends presque plus rien.
Intrépide et stupide, encombré de tâches qui t'entraînent dans des tâches, essayant d'atteindre un but que tu ornes comme un arbre de Noël.
As-tu droit à Noël et à une maison calme ? As-tu le droit d'écrire ces oeuvres de calme qui jugent les hommes et les condamnent à mort ?
L'autre soir, pendant une conversation à table, tu as appris ton âge. Tu ne le savais même pas car tu comptes mal et tu n'établissait pas le moindre rapport entre la date de ta naissance et l'année où nous sommes. Quelque chose en toi en a été stupéfait. Ce quelque chose s'est pernicieusement communiqué à l'organisme, jusqu'à ce que tu te dises : "Je suis vieux." Tu préférais sans doute t'entendre dire : "Tu es jeune", et croire ce que te racontent les flatteurs.
Intrépide et stupide, il te fallait prendre un parti. Cela limite la difficulté d'être, puisque pour ceux qui embrassent une cause, ce qui n'est pas cette cause n'existe pas.
Mais toutes ces causes te sollicitent. Tu as voulu ne te priver d'aucune. Te glisser entre toutes et faire passer le traîneau.
Eh bien, débrouille-toi, intrépide ! Intrépide et stupide, avance. Risque d'être jusqu'au bout.

Jean Cocteau
La difficulté d'être : postface

09 octobre 2011

Largage dominical #28


what can we do?
at their best, there is gentleness in Humanity.
some understanding and, at times, acts of
courage
but all in all it is a mass, a glob that doesn't
have too much.
it is like a large animal deep in sleep and
almost nothing can awaken it.
when activated it's best at brutality,
selfishness, unjust judgments, murder.
what can we do with it, this Humanity?
nothing.
avoid the thing as much as possible.
treat it as you would anything poisonous, vicious
and mindless.
but be careful. it has enacted laws to protect
itself from you.
it can kill you without cause.
and to escape it you must be subtle.
few escape.
it's up to you to figure a plan.
I have met nobody who has escaped.
I have met some of the great and
famous but they have not escaped
for they are only great and famous within
Humanity.
I have not escaped
but I have not failed in trying again and
again.
before my death I hope to obtain my
life.

Charles Bukowski
from blank gun silencer - 1994

08 octobre 2011

Oh yeah

II faut tourner la page
Changer de paysage
Le pied sur une berge
Vierge
II faut tourner la page
Toucher l'autre rivage
Littoral inconnu
Nu
Et là, enlacer l'arbre
La colonne de marbre
Qui fuse dans le ciel
Tel
Que tu quittes la terre
Vers un point solitaire
Constellé de pluriel
II faut tourner la page...
Redevenir tout simple
Comme ces âmes saintes
Qui disent dans leurs yeux
Mieux
Que toutes les facondes
Des redresseurs de monde
Des faussaires de Dieu
II faut tourner la page
Jeter le vieux cahier
Le vieux cahier des charges
Oh yeah
II faut faire silence
Traversé d'une lance
Qui fait saigner un sang
Blanc
II faut tourner la page
Aborder le rivage
Où rien ne fait semblant
Saluer le mystère
Sourire
Et puis se taire

02 octobre 2011

Largage dominical #27

Je déambulais sur la place baignée de soleil d’un joli quartier toulonnais où j'aime me ballader. Assez bourgeois, sans doute, à en juger par la vue splendide qu’offrent les terrasses des grandes maisons toutes orientées vers la mer. Je flanais, donc, accompagnée de ma fille, dans ce vide-grenier plutôt huppé, quand mon regard s’est arrêté sur une femme souriante, qui semblait jouer le jeu avec délice et appelait les passants d’un air enjoué. Elle vendait les chemises de son mari, celles qu’il n'a jamais mises. Elle était drôle cette femme, me proposant de lui acheter deux euros ces jolis vêtements qu’elle avait apportés en cadeau à son homme, et qu’il avait acceptés avec un tendre sourire, peut-être un peu moqueur, tout en sachant qu’il ne les porterait jamais plus d’une fois, juste pour lui faire plaisir. Elle se mit à me les montrer toutes, accompagnant ses gestes du récit amusé et teinté de tendresse des souvenirs liés à ses cadeaux désormais étalés, un peu froissés, sur une bâche bleue. J’imaginais cette femme amoureuse traînant les boutiques en pensant à son homme. Je pouvais presque la voir rentrant chez eux, lui glissant joyeusement entre les mains un joli papier de soie contenant une de ces chemises, avec au fond du cœur le plaisir d’offrir à son amoureux un petit peu d’elle-même. Sa tranquille jovialité, sa façon de rire de bon cœur de ses « bides » m’ont tant attendrie que je l’ai laissée faire, complice et amusée. Tout en me parlant, elle me tendait les tissus provençaux, les douces soies brodées, les cotons colorés, et ce moment tout simple de connivence avec cette femme inconnue a fait remonter en moi le souvenir de la joie enfantine que j’éprouvais parfois, il n’y a pas si longtemps, à voir dans le regard aimé la petite lueur complice de ces moments futiles, quand on est deux, et que la vie est faite aussi de ces instants qui s’évanouissent vite, qui ont apparemment si peu d’importance, et dont on ne mesure la douceur que quand on les a perdus. Je suis rentrée chez moi avec une chemise blanche, très belle, toute simple, et trop grande pour moi.

18 septembre 2011

Largage dominical#26


Ton rire
Tu peux m’ôter le pain,
m’ôter l’air, si tu veux :
ne m’ôte pas ton rire.
Ne m’ôte pas la rose,
le fer que tu égrènes
ni l’eau qui brusquement
éclate dans ta joie
ni la vague d’argent
qui déferle de toi.
De ma lutte si dure
je rentre les yeux las
quelquefois d’avoir vu
la terre qui ne change
mais, dès le seuil, ton rire
monte au ciel, me chercha
et ouvrant pour moi toutes
les portes de la vie.
A l’heure la plus sombre
égrène, mon amour,
ton rire, et si tu vois
mon sang tacher soudain
les pierres de la rue,
ris : aussitôt ton rire
se fera pour mes mains
fraîche lame d’épée.
Dans l’automne marin
fais que ton rire dresse
sa cascade d’écume,
et au printemps, amour,
que ton rire soit comme
la fleur que j’attendais,
la fleur guède, la rose
de mon pays sonore.
Moque-toi de la nuit,
du jour et de la lune,
moque-toi de ces rues
divagantes de l’île,
moque-toi de cet homme
amoureux maladroit,
mais lorsque j’ouvre, moi,
les yeux ou les referme,
lorsque mes pas s’en vont,
lorsque mes pas s’en viennent,
refuse-moi le pain,
l’air, l’aube, le printemps,
mais ton rire jamais
car alors j’en mourrais.
(Pablo Neruda)

13 septembre 2011

La citation du jour #1

" La propagande moderne désigne un effort cohérent et de longue haleine pour susciter ou infléchir des événements dans l'objectif d'influencer les rapports du grand public avec une entreprise, une idée ou un groupe."


Edward Bernays, Propaganda


Bernays a écrit "Propaganda" en 1928....

11 septembre 2011


"Dans le monde réellement renversé, le vrai est un moment du faux." Guy Debord

Oil, Smoke & Mirrors - Pétrole et écrans de fumée. par ReOpen911

A voir, je crois.
Et puis, avant ou après, lire Debord...


11 septembre... et pas seulement

Demain,  l'Histoire


Triste pareil à moi il ne s'en fait plus
je regarde ce peuple qui va bientôt mourir
triste ainsi qu'il n'est plus possible
de l'être autant


personne ici ne meurt de sa belle mort
c'est un peu de nous tous en celui qui s'en va
et c'est en celui qui naît un peu de nous tous
qui devient autre


toi aussi tu seras triste un jour Humanité
mal tu auras dans les os certains siècles
le mal fantôme dans la vacance historique
de l'origine


Hommes
l'Histoire ne sera peut-être plus
retenez les noms des génocides
pour qu'en votre temps vous n'ayez pas les vôtres 
hommes
il faut tuer la mort qui  sur nous s'abat
et ceci appelle l'insurrection de la poésie 




Gaston Miron L'homme rapaillé

10 septembre 2011

Pierre en Malaisie

















Six mois déjà que tu as choisi de quitter la Vieille Europe pour aller vivre en Malaisie.
Des bises, mon amour.
Continues à prendre soin de toi, et sois heureux.

05 septembre 2011

Une Île


















































































































Ma maison désertée pendant ces quelques jours a gardé l’odeur de l’encens que j’y ai fait brûler avant de la quitter. Je reprends contact avec ma vie en défaisant nos sacs. Je regarde dehors la pluie tomber et j’imagine la même fenêtre, celle de cette maison que j'aime, ouverte sur la mer, sur les bateaux dansant dans le vent de là bas. Dans quelques jours, il ne restera presque rien de cette escapade, quelques photos, quelques souvenirs revenant au cœur d’une conversation. Peu à peu nos corps perdront les belles couleurs que leur a donnés cette semaine marine. Un pincement léger au cœur me rappelle à la douceur de cette île si jolie. Cette île où je m’imagine désormais en hiver, passagère d’une chambre donnant sur la mer, le vent faisant claquer les volets. Je rêve soudain de m’offrir ce luxe inouï: Passer un mois entier à Porquerolles, avec pour seuls bagages mon ordinateur, mon appareil photo, un cahier et des stylos.
Une image me revient sans cesse. Celle de Claudine, cette femme rencontrée là bas.
Cette femme au doux visage fatigué, revenue sur son île après vingt ans d’absence.
Elle a su si bien m'expliquer en quelques mots la vraie vie sur son île, me raconter la douceur de l’hiver après la dureté du labeur estival de ceux qui se battent pour y rester. Comme beaucoup d'îliens, elle lutte chaque jour pour subsister en composant avec la mafia du fric créée par ceux qui ont les moyens de s’offrir les maisons et les appartements reloués l’été à prix d’or aux touristes, à ceux qui, comme moi, viennent s’imprégner pendant quelques heures ou quelques jours de la magie de ce petit paradis sauvage et beau, où le mètre carré atteint des prix m'interdisant tout rêve de m'y installer.
Je songe à y revenir, seule cette fois ci, à m’enfermer, à écrire.
Car s’il est une chose que cette petite île magnifique a réveillé en moi, c’est  l'envie d’écrire.
Mais en attendant, retour à la routine.
La course dès le matin jusqu’à la fin du jour.
Les nuits sans sommeil passées à se demander pourquoi c’est si difficile parfois.
Les lendemains pleins d’espoir.
Et ainsi de suite.
La vie, la vraie vie, la mienne.
Celle où on se dit chaque jour que, forcément, demain sera meilleur.
Et l’attente, la stimulante attente du retour en solitaire sur le joli caillou, bientôt, peut-être.
  

27 août 2011

Porquerolles

Les vacances se terminent bientôt.
Nous, on a décidé de finir en beauté, alors aujourd'hui, on s'en va là pour une semaine.
C'est pas loin de chez nous, juste à 20 minutes de route et 20 autres de bateau
Là bas, pas de voitures, pas d'internet, juste la mer, les rochers, les plages et les petits chemins à parcourir au royaume du vélo, le nez au vent et les cheveux en bataille.
Et puis les soirées sur l'île soudain désertée par les touristes, la douceur du soir sur la place du village, à regarder les gens jouer aux boules ou boire des pots sur les terrasses.


Je ne doute pas une seconde que l'image de la paix du Défifoto du 1er septembre se cache là-bas, quelque part...
Au retour, je vous raconterai.
Portez-vous bien tous.

25 août 2011

Un bel été

Lundi. J'ai déposé Nino Et Lili sur la plage. Dans leurs combinaisons de plongée, par 30 °, ils transpiraient à grosses gouttes. Je suis partie, vaguement inquiète de les laisser en plein soleil attendre le début de leur cours.
Deux heures plus tard, je les vois arriver sur le bord de la plage, sur leurs planches, voiles au vent et sourires jusqu'aux oreilles.
-" Ah, c'tait géant Maman, dommage que t'aies pas pu venir avec nous"
- " T'as vu hein, j'ai réussi, j'ai pas tout compris encore comment ça marche, mais j'ai réussi!"


Dans leurs yeux, il y a ce plaisir enfantin que j'aime et que je lis si souvent désormais sur leurs visages bronzés et épanouis.
C'est décidément un bel été...


Jeudi. Ils apprennent à vitesse grand V et semblent s'éclater comme des fous, malgré le vent qui tourne et les difficultés, gamelles, bleus et chocs en tout genre...


Quelques photos de ces vacances qui passent si vite...














































































21 août 2011

Largage dominical #25

Je ne connaissais que de nom et n'ai jamais lu Gil Courtemanche.
Un billet lu chez Venise m'a donné envie de chercher un peu
J'ai trouvé et téléchargé un extrait de son dernier ouvrage "Je ne veux pas mourir seul",
et ses mots se sont trouvés, là, sous mes yeux, terribles, si terribles.


"....  être confronté au malheur des autres, apprendre de leur résilience. Je hais ce mot qui prétend annuler toutes les douleurs comme une aspirine. La douleur existe. Elle peut tuer. Miner les âmes les plus fortes et les réduire à un état cadavérique. 
Elle peut éteindre l’intelligence, la confisquer, la rendre inopérante. La douleur n’est pas un passage, ce peut être un état, un mode de vie. On peut l’apprivoiser, la gérer. 
Cela ne nous rend pas plus heureux ou vivant. Cela nous rend douloureux, contrôlé comme un malade chronique qui gère sa maladie. Un diabétique de la douleur. ..."

Lire ça, ça me fait froid dans le cœur...


20 août 2011

19 août 2011

du tac au tac

Mon pote Christophe, grand gaillard d'une quarantaine d'années, aime bien taquiner mon fils et ils se chamaillent souvent. 


Aujourd'hui , dialogue après le déjeuner.
On a mangé de l'Aïoli aujourd'hui, le contexte des vannes est donc marin.


Christophe, (à Nino qui tient beaucoup à ses dreadlocks)
- "Hé Nino, t'en a pas marre d'avoir un poulpe sur la tête ?"


Nino, (à Christophe, qui est disons, enrobé)
- "Ben moi, je préfère ça qu'avoir un cachalot dans le bidon !"


Plié de rire le Christophe.





15 août 2011

Nouveau matin

Je regarde ce matin dans le miroir mes yeux à nouveau si clairs, et ces rides, mes rides que je me surprends à aimer et qui tracent sur mon visage les sillons de mon sourire enfin retrouvé. 
Et ce que je vois dans ce miroir, c’est toi.
Toi qui aimes tant le matin.

12 août 2011

Reflux


Quand le sourire éclatant des façades déchire le décor fragile du matin ; quand l'horizon est encore plein du sommeil qui s'attarde, les rêves murmurant dans les ruisseaux des haies ; quand la nuit rassemble ses haillons pendus aux basses branches, je sors, je me prépare, je suis plus pâle et plus tremblant que cette page où aucun mot du sort n'était encore inscrit. Toute la distance de vous à moi - de la vie qui tressaille à la surface de la main au sourire mortel de l'amour sur sa fin - chancelle, déchirée. La distance parcourue d'une seule traite sans arrêt, dans les jours sans clarté et les nuits sans sommeil. Et, ce soir, je voudrais, d'un effort surhumain, secouer toute cette épaisseur de rouille - cette rouille affamée qui déforme mon coeur et me ronge les mains. Pourquoi rester si longtemps enseveli sous les décombres des jours et de la nuit, la poussière des ombres. Et pourquoi tant d'amour et pourquoi tant de haine. Un sang léger bouillonne à grandes vagues dans des vases de prix. Il court dans les fleuves du corps, donnant à la santé toutes les illusions de la victoire. Mais le voyageur exténué, ébloui, hypnotisé par les lueurs fascinantes des phares, dort debout, il ne résiste plus aux passes magnétiques de la mort. Ce soir je voudrais dépenser tout l'or de ma mémoire, déposer mes bagages trop lourds. Il n'y a plus devant mes yeux que le ciel nu, les murs de la prison qui enserrait ma tête, les pavés de la rue. Il faut remonter du plus bas de la mine, de la terre épaissie par l'humus du malheur, reprendre l'air dans les recoins les plus obscurs de la poitrine, pousser vers les hauteurs - où la glace étincelle de tous les feux croisés de l'incendie - où la neige ruisselle, le caractère dur, dans les tempêtes sans tendresse de l'égoïsme et les dérisions tranchantes de l'esprit.
Pierre REVERDY
(Ferraille).

Manifeste

On m'a dit : "Fais des chansons comme-ci" On m'a dit : "Fais des chansons comme-ça" Mais que surtout ça ne pa...