Mon précédent post vous offrait la bouillonnante prose d’une dame de 70 ans, mais moi, je ne sais pas si je passerai l’hiver. Uhm. (le lien, c’est contractuel entre moi et mes pieds, point barre). J’ai compris pourquoi je vais bien mieux l’été. C’est parce que je n’écoute jamais plus la radio. Et aussi parce qu’il y a du soleil et qu’il fait chaud, je sais…
Une émission de radio du week-end à l’enseigne d’«Eclectick», pilotée par une louve à la voix suave, fipette du XXI ème, propose chaque samedi matin un bruyant et peu subsersif décryptage de l’info. Jeunes chroniqueurs pour la plupart, ils aiguisent leurs petites dents sur des sujets aussi cruciaux que le tordant auto-entartrage de BHL, qui n’avait guère besoin d’eux pour faire la démonstration qu’il est un con à la pensée creuse.
Gonflés à bloc par leur taux d’écoute en progression constante, la fine équipe consacre ce matin sa revue de presse du pire à la Saint-Valentin. C’est si drôle - et très tendance- de se foutre de la gueule des beaufs en citant Houellebecq…et de se tordre de rires complices et auto-satisfaits.
Cette suffisance, ce côté «vous pouvez pas comprendre, c’est très second degré», me fait à peine sourire et je suis tentée de leur couper la chique. D’autant que leurs élucubrations ne sont qu’une resucée paresseuse des captivants bulletins d’infos de la chaine.
Je ne sais pas pourquoi je continue à écouter cette chose. Un peu endormie, je déguste mon café. La bonne odeur du pain grillé dans les narines, je n’attends rien de bien nouveau mais bon, j’écoute encore un peu. La suite, j’aurais préféré ne pas l’entendre. Trop tard.
Le capitaine et les matelots de ce petit rafiot naviguent tout à coup sur de l’info nouvelle.
Arrive un reportage sur la Gav. C’est quoi ça ? demande l’ingénue fipette. La garde à vue, lui répond, bien rodé, son riant acolyte, et de sortir les chiffres : 900 000 gardes à vue par an en France, Ah ! Ça fait 1 français sur 9, quand même,qui risque de s’y retrouver un jour. C’est pas rien hein ?
Ah pardon ! - suit un inénarrable moment de grâce et de confusion, je me suis trompé avec ma calculette en fait ça fait 1 sur 90. Ah, vous m’avez fait peur ! La rigueur journalistique est à son plein - . Et nous voilà au cœur du sujet. Ce jeune homme a rencontré des consultants, qui proposent des formations à la garde à vue, moyennant 600 euros la journée. Quand même! s’exclame l’insupportable Fipette, faussement outrée, et trop mauvaise comédienne pour que je n’entende pas dans sa voix son admiration et sa concupiscence envers les répugnants spéculateurs, charognards de la peur, qu’elle et sa super équipe de petits merdeux présentent, tous fiers de leur immonde scoop, à mes oreilles soudain bourdonnantes.
Interviews croisées : Un participant au séminaire, après un entraînement avec le faux policier-consultant : « Au bout de 48 heures, est ce que je serai capable de me recentrer, …c’est un marathon, je dois m’adapter a la technique, je crois en la justice, mais si on me fait dire des choses que j’ai pas voulu dire… avec des mots qui peuvent être mal interprétés, … je vais me retrouver dans une situation avec un procès verbal que j’ai signé parce que j’ai craqué… »
Le formateur qui gère le côté technique, c'est-à-dire explique le chroniqueur « …qui joue au policier… » rappelle que : « l’objectif quasi officiel de la garde à vue consiste à placer le mis en cause dans une sorte d’état de choc qui anesthésie ses capacités d’analyse, de mémoire et de réaction. L intéressé ignore tout de la réalité des charges et de l’étendue de ce qui lui est reproche… La reine des preuves est l’aveu en France... »
La formatrice, qui elle, intervient sur les aspects psychologiques de la garde à vue explique son travail: «apprendre à réutiliser l’expérience dans d’autres contextes… » « En situation de crise et de coup dur on va culpabiliser sur plein de choses alors qu’on n’a rien fait et devoir payer le prix de sa culpabilité …comment éviter de craquer…»
A mon avis, il y a un marché à prendre, poursuit le chroniqueur.
Et moi j’ai la nausée.